L'objectif de cette recherche est d'essayer de comprendre comment il se peut que, dans des sociétés modernes où savoir lire, écrire et calculer au moins à peu près convenablement semble indispensable pour vivre et travailler de façon normale, tant d'adultes ayant pourtant fréquenté l'école des années, souvent bien au-delà des degrés primaires, soient si faibles dans ces branches de base. Dans cette étude sur l'illettrisme deux aspects sont à distinguer: le manque de compétence fonctionnelle, le manque d'instruction de base. Dans les deux cas, il s'agit d'un degré jugé insuffisant de maîtrise de la lecture, de l'écriture ou du calcul. La différence tient à la nature des exercices utilisés pour l'évaluation. On parle de compétence fonctionnelle et de manque de compétence fonctionnelle à propos des résultats d'exercices faisant intervenir des formes élémentaires de lecture, d'écriture ou de calcul dans l'accomplissement de tâches utilitaires tout à fait banales: compter de la monnaie, consulter un annuaire téléphonique, remplir une carte de commande par exemple. Les enquêtes 2 et 3 ne concernent que la compétence fonctionnelle ainsi définie. Il est question d'instruction de base et de manque d'instruction de base à propos des résultats d'exercices visant les capacités de lecture, d'écriture ou de calcul plutôt en elles-mêmes que dans leurs applications à la réalisation de tâches pratiques. Deux des sondages utilisés pour cette enquête ont eu lieu à Genève. Le premier (enquête 1), assez détaillé, a porté sur un échantillon de 1401 répondants (population de 20 ans et plus, suisse et étrangère, du canton de Genève). Les exercices utilisés lors de ce sondage consistent à lire des textes simples et à répondre à des questions sur leur sens et également à effectuer quelques simples calculs (instruction de base). Ils sont d'un niveau modeste, celui des capacités qui suffisent pour lire des informations destinées au grand public, ne pas commettre trop de fautes en accordant des verbes faisant partie d'une lettre de quelques lignes rédigée en des termes tout à fait courants, avoir une idée de ce que signifie un pourcentage, par exemple. Il s'agit bien d'instruction de base, primaire ou à peu près, et de rien de plus. Le deuxième sondage (enquête 2) porte sur les compétences fonctionnelles en se centrant sur deux fractions de l'échantillon interviewé dans le cadre de l'enquête 1: d'une part les 100 personnes dont les performances dans les exercices de la première enquête sont les moins bonnes, d'autre part un échantillon de 100 personnes tiré dans le reste de l'échantillon de la première enquête. Le troisième sondage (enquête 3) a porté sur un échantillon représentatif de la population suisse (population de 15 ans et plus, suisse et étrangère). Il n'a comporté qu'un petit nombre d'exercices, choisis sur la base des résultats des sondages genevois. Ces quelques exercices ont paru convenir pour estimer l'ordre de grandeur de la proportion des cas d'illettrisme particulièrement marqués.
The aim of this study is to try to understand how it is possible that, in modern societies where the ability to read, write and calculate at least about correctly seems indispensable for living and working in a normal way, so many adults who have nevertheless attended school for years, often well beyond primary education, are so weak in these basic branches. In this study on illiteracy two aspects are to be distinguished: lack of functional competence, lack of basic education. In both cases, it is a level of literacy or numeracy that is considered insufficient. The difference lies in the nature of the exercises used for the evaluation. Functional competence and lack of functional competence refer to the results of exercises involving basic forms of reading, writing or arithmetic in the performance of quite common utilitarian tasks: counting change, consulting a telephone directory, filling out an order card, for example. Surveys 2 and 3 concern only the functional competence thus defined. Basic instruction and lack of basic instruction refer to the results of exercises that target literacy or numeracy skills in themselves rather than in their application to practical tasks. Two of the surveys used for this study took place in Geneva. The first (survey 1), quite detailed, covered a sample of 1401 respondents (population aged 20 and over, Swiss and foreign, from the canton of Geneva). The exercises used in this survey consist of reading simple texts and answering questions about their meaning and also doing some simple calculations (basic instruction). They are of a modest level, i.e. the capacities to read information intended for the general public, not to commit too many mistakes when using verbs forming part of a letter of a few lines written in quite common terms, to have an idea of what a percentage means, for example. It is basic education, primary education or something like that, and nothing more. The second survey (survey 2) focuses on functional skills by focusing on two fractions of the sample interviewed in survey 1: on the one hand the 100 people whose performance in the exercises of the first survey are the least good, and on the other hand a sample of 100 people drawn from the rest of the sample of the first survey. The third survey (survey 3) covered a representative sample of the Swiss population (population aged 15 and over, Swiss and foreign). It included only a small number of exercises, chosen on the basis of the results of the Geneva surveys. These few exercises seemed appropriate for estimating the order of magnitude of the proportion of cases of particularly marked illiteracy.