Cet entretien a eu lieu le 16 septembre 2009 à Karaganda, Kazakhstan. Il a été mené par Isabelle Ohayon, avec la participation de Alain Blum qui s'occupait de l'enregistrement. L'entretien a été réalisé en russe. Il a duré 1 heure et 32 minutes.
BiographieMikhaïl Krecu est né en 1939 à Kazankhik, ville de Roumanie qui deviendra moldave par la suite. Ses parents, paysans — propriétaires, sont déportés en juin 1941. Ils ne sont pas aisés pourtant, n’embauchent pas de travailleurs. En outre, l’éducation de leurs enfants témoigne du peu de moyens dont ils disposent. Le père de Mikhaïl Krecu est envoyé dans le camp d’Ivdel' dans la région de Sverdlovsk où il mourra l’année de la déportation à l’âge de 51 ans. Mikhaïl et sa mère sont amenés au Kazakhstan, où le wagon de bétail qui leur sert de moyen de transport les dépose au bourg Malinovka, petit village à 75 km d’Astana. Mikhaïl qualifie ce camp d’espace réservé aux « traîtres de la patrie ». Il y rencontre de nombreux autres déportés de provenances différentes : Juifs, Grecques, Tchétchènes et Ingouches. Croyante, sa mère maintient la pratique religieuse en déportation, respecte rigoureusement les fêtes religieuses et éduque son fils dans la foi. Aujourd’hui, Mikhaïl se rappelle que la pratique religieuse était un signe de distinction sociale, même au sein d’une exceptionnelle palette de cultures et de rites. En 1954, lorsque Mikhaïl a 15 ans, il entame ses études à l’école technique à Karaganda et s’installe dans cette ville. Ce n’est que quatre ans plus tard que sa mère est libérée et réhabilitée. Contrairement à son fils, elle ne dispose pas de passeport et est obligée de se présenter plusieurs fois par semaine aux autorités locales. Bien que sa mère ait voulu partir, bien qu’une fois majeur, Mikhaïl soit libre de quitter le Kazakhstan, ils restent liés par les obligations familiales et professionnelles. Mikhaïl y poursuit ses études et, en 1967, il est diplômé de l’enseignement supérieur. L’histoire de son parcours professionnel dans les mines et de son ascension sociale se trouve au centre de son récit. Ayant commencé par travailler au kolkhoze (alors qu’il était encore colon spécial), il est devenu mineur puis a gravi les échelons au sein de la mine : ingénieur, directeur adjoint et finalement directeur — et membre du Parti. Sa nomination en tant que directeur des mines a eu lieu au moment des grèves en 1994. Actuellement, il travaille à l’institut de la sécurité de l’industrie minière.
BiographyMikhaïl Krecu was born in 1939 in Kazankhik, city in Romania that became Moldovan thereafter. His parents, peasants – owners of their plot, were deported in June 1941. However, they were not comfortably off. The family didn't hire workers. Moreover, the education of their children reflects the limited resources they had. The father of Mikhaïl Krecu was sent into the camp of Ivdel' (Sverdlovsk region) where he died the year of the deportation, at the age of 51. Mikhaïl and his mother were brought to Kazakhstan, where cattle wagon, their means of transport, dropped them off in Malinovka, a small village situated 75 km from Astana. Mikhaïl qualifies this special settlement of camp for "traitors of the fatherland". Here, he lived with the deportees having different origins: Jews, Greeks, Chechens and Ingush. Fervent believer, his mother maintained in deportation her religious practice, strictly adhered to religious celebration days and educated his son in the faith. Today Mikhaïl remembers that religious practice was a sign of the social distinction, even within an exceptional diversity of cultures and rites. In 1954, when Mikhaïl was 15 years old, he began his studies at the technical school in Karaganda and settled in this city. Only four years later, his mother was released and rehabilitated. Unlike her son, she had no passport and was obliged to report to the local authorities several times a week. Although his mother wanted to leave Kazakhstan for Moldavia, although, once major, Mikhaïl was free to leave this Soviet republic, they remained because of family and work obligations. Mikhaïl continued his studies and in 1967 he graduated from higher education. His career in mining and his social mobility are at the center of his story. In mine industry, he was an electrician, mechanic mountain, vice director and director. The last appointment was made at the time of the strikes in 1994. Currently, he works at the Institute of safety in the mining industry.